Parc National de Terre de Feu
Après 10 jours de mer, bien amarrés au Club AFASyN, face à la ville d’Ushuaïa dominée par les montagnes enneigées de la chaîne Martial, nous avons des fourmis dans les jambes. La voiture louée le premier soir, nous étions prêts à partir à la découverte du fameux Parc National de Terre de Feu.
Créé en 1960, le parc fait environ 10 km de large sur 70 km de long et étend ses 69.000ha sur un axe nord-sud. Il est bordé par le canal de Beagle au sud et par le Chili à l’ouest. Seule une petite partie de la zone méridionale est accessible au public grâce à des sentiers aménagés.
9h30, nous sommes au kiosque d’accueil après 13 kilomètres de route puis de piste. Nous ne sommes pas seuls, nombre de voitures particulières et de minibus nous ont précédés ! Accueil cordial par le personnel du Parc, qui une fois payés les droits d’entrée (environ 30€ par jour et par personne), nous décrit en détail les sentiers recommandés.
Pour commencer ce sera le sentier côtier, environ 7 km en bordure de la Baie Ensenada Zarategui qui s’ouvre sur le Canal de Beagle. Surprise, installée sur pilotis au bord d’une petite plage, la poste argentine la plus au sud du pays nous accueille. Puis nous attaquons le sentier qui grimpe et descend à travers la forêt qui s’étend jusqu’à la mer.
De nombreux troncs dénudés se mélangent au feuillage bien vert des Hêtres australs et de Patagonie (« Faux-hêtres) », des arbres typiques de la région. La nature s’occupe seule de la « gestion » du parc, l’homme met seulement la main pour l’entretien des pistes et des sentiers… La présence inhabituelle pour nous de nombreux arbres morts nous rappelle le cycle de la vie… Des lichens s’accrochent aux branches, de frêles orchidées, les palomitas, poussent dans les sous-bois au pied de buissons d’épine-vinette de Darwin aux fleurs jaunes. Sur certains arbres, de curieuses excroissances recouvertes de boules orangées de quelques centimètres de diamètre nous intriguent : ce sont des « pains de l’Indien », champignons comestibles qui se développent sur les chancres créés par la réaction des faux-hêtres quand ils sont attaqués.
Peu de vie animale visible, il faut dire que le sentier est très fréquenté aussi bien par les Argentins que par les touristes étrangers en visite guidée (en plus nous sommes un dimanche !). Malgré ces dérangements, un couple de Brassemers (ou Canards-vapeur) cendrés se repose tranquillement sur les rochers en bord de plage. Mais nous échouons dans notre recherche du Pic de Magellan, un magnifique oiseau noir à tête rouge écarlate. Après 1h et demi, nous rebroussons chemin Patrick et moi pour aller rechercher la voiture, pendant que Jean-François poursuit à grands pas.
Nous le retrouverons à midi, pour aller déjeuner au restaurant du Centre d’interprétation du parc, l’Alakush. La nourriture basique ne nous laissera pas beaucoup de souvenirs, mais la vue depuis le restaurant sur le Lac Acigami est superbe. Nous sommes juste repartis quand j’aperçois un couple d’Ouettes de Magellan, mâle blanc à la poitrine striée de noir et femelle brun foncé à la tête rousse. 4 canetons les accompagnent. Sur l’eau, un couple de grands Cygnes à cou noir se nourrit d’herbes aquatiques. Corps blanc immaculé, tête et cou noirs, ils arborent une magnifique caroncule rouge vif.
Nous revenons vers l’entrée du parc, pour une dernière marche sur le sentier des chutes du Rio Pipo. Le sentier se dirige vers le nord, vers le bas d’une montagne d’où coule une belle rivière d’une vingtaine de mètres de large, le Rio Pipo. De grandes zones dégagées de prairies avec des buissons et arbres dispersés forment un milieu naturel bien différent. Il y a moins de monde que le matin et nous pouvons admirer tranquillement le Pépoaza œil de feu, un beau passereau gris à l’œil orange, le Caracara chimango, une espèce de faucon, ou encore le Vanneau Téro. A 2 km du parking, le sentier s’élève à travers les bois et nous arrivons aux « chutes du Rio Pipo », en fait un simple rapide créé par un étranglement entre les rochers, mais très photogénique quand même !
Nous terminerons là cette première journée dans le Parc avant de retrouver Ikesso à Uhuaïa.
Nous découvrirons le lendemain d’autres secteurs du Parc, les rives de la baie Lapataia où vivaient il y a 150 ans encore les Indiens Yagans dans des huttes en branches. Ils se nourrissaient de baies, de coquillages et d’animaux marins. Peu de traces restent de ces peuplades originelles, décimées à l’arrivée des colonisateurs par la perte de leurs ressources naturelles et par les maladies importées ….
Et je reviendrai seul pour mon dernier jour en Patagonie pour tenter – toujours sans succès – d’apercevoir le Pic de Magellan ou le Renard de Magellan, deux espèces emblématiques du Parc. Le ciel me gratifiera quand même en guise d’adieu d’une bonne chute de neige au retour du Rio Pipo !